"Inventaires" de Philippe Minyana
Elles sont trois. Jacqueline, Angèle, Barbara : petites bonnes femmes cabossées par la vie, invitées sur un hypothétique plateau de télé-réalité à déballer leurs existences à travers quelques objets réveille-mémoires… Exposées, exhibées, manipulées, censurées, dans l’aveuglement des lumières crues et des paillettes, orchestrées par les musiques et les rythmes d’une présentatrice toute puissante, elles sont venues pour gagner on ne sait quoi … Peut-être seulement le droit de dire, de se dire… Nouvelles Cendrillons dont la pantoufle de vair a plus souvent laissé des ampoules sur les pieds meurtris que vu apparaître le prince charmant, elle se livrent, dérisoires et touchantes à force de sincérité. Avec une féroce drôlerie et des touches de tendresse, cette pièce révèle l’obscénité de notre société spectacle.
À sa création il y a quinze ans, cette pièce était un peu visionnaire. Aujourd’hui, elle a été rattrapée, voire dépassée, par la réalité des émissions de télé-réalité. Il n’en reste pas moins que le langage, la forme libre et la part laissée belle aux comédiennes donne à cet Inventaires un pouvoir satirique acidulé et percutant que seul le théâtre peut offrir grace aux eclairs lumineux et à la magie du spectacle vivant.
Arlette ALLAIN a choisi de confier la mise en scène de ce spectacle à Frédéric De GOLDFIEM jeune metteur en scène issu de l’école de la Comédie de Saint Étienne dont on avait pu apprécier la version très originale d’un Hamlet en 2001 et qui depuis a signé plusieurs mises en scènes au Théâtre National de Nice où il est devenu permanent. Un regard et un style très personnel qui interroge aussi l’art théâtral et ce qu’il laisse comme traces dans la mémoire collective : on a tous des inventaires à faire..!